La chambre était plongée dans la pénombre, tout était silencieux et pourtant Louis ne parvenait pas à trouver le sommeil. Comme un rappel, à chaque instant où il était sur le point de s’endormir, un souvenir le gardait alerte. Il s’était levé, plusieurs fois, fait le tour de l’appartement, lu et relu tous ses dossiers en espérant qu’au bout de quelques heures, il s’effondrait de fatigue et ne se réveillerait qu’au petit matin. Mais il faut croire que les souvenirs sont tenaces et ne se laissent pas ignorer si facilement. Il fixa le plafond, pendant quelques minutes, des heures peut-être, plafond sombre comme le reste du Monde, au beau milieu de la nuit. Il se retourna, encore et encore, cherchant à trouver la bonne position mais il du se rendre à l’évidence que c’était son esprit qui n’était pas bien positionné. Des nuits comme celles ci, il les connaissait bien. Des nuits passées à attendre indéfiniment de s’endormir, y parvenir afin mais de façon si courte qu’il était plus supportable de ne pas fermer l’oeil. Il les appelait les secondes journées, plus longues et dures que les premières, où il n’y avait ni Ministère, ni enquête, simplement un interminable tête à tête avec ses pensées. Tous les soirs il observait sa fiancée s’endormir rapidement, il entendait sa respiration se calmer et soudain, elle n’était plus là pour quelques heures. Il se retourna vers elle. Magnifique, sans en avoir conscience. Il observa son visage, même en l’ombre il distinguait ses traits fins. Il s’approcha d’elle, tout doucement, ne voulant pas briser cet instant calme et si reposant. Quelque part, être témoin de ses nuits calmes sans agitations valait la peine d’être éveillé toute la nuit. Sa poitrine se soulevait à intervalles réguliers, comme le bruit d’une horloge apaisante. Elle avait quelques cheveux bruns sur le visage, Louis les retira et passa une main sur son front. Elle n’avait pas chaud, elle n’avait pas froid. Louis en aurait presque été jaloux. Ses doigts descendirent contre la peau de son cou, avec un extrême soin pour ne pas la réveiller, déposa un baiser sur ses doigts qu'il emprisonna avec les siens. Il ressenti soudain le besoin d’être avec elle, tout de suite. D'entendre sa voix, qu'elle le serre contre elle, sentir sa chaleur. C'était égoïste et Louis le savait, de quel droit pouvait-il la perturber ainsi ? Elle méritait quelques heures loin du vacarme habituel. Il resta quelques instants de plus à la contempler, sa belle Olga, plongée ailleurs. Comme un tableau figé et parfait. Il n'osait pas la déranger et pourtant il n'y restait pas. Il s'approcha, encore un peu plus, sentant cette fois ci leurs jambes se rejoindre. Il était tout proche d'elle. Ses lèvres près des siennes il murmura : « Olga. » Une première fois, comme un appel à l’aide l’implorant de revenir vers lui, de ne pas le laisser seul. Ces nuits d’insomnies le rendait fou, il perdait l’équilibre lorsqu’elle s’endormait. Il regarda son visage encore fermé, se mordit la lèvre. « Olga. » répéta t-il. Il s’en voulait déjà, elle devait être épuisée de devoir, presque toutes les nuits, lui parler. Il pris une longue inspiration, caressa du bout des doigts sa main, espérant provoquer quelque chose chez elle.

Le bruit du vent, voilà ce dont elle se rappelait. Si calme, si paisible. Il y avait aussi cette chaleur si réconfortante que lui procurait la proximité de son fiancé. Elle aurait pu se perdre dans son regard, d’ailleurs, d’un bleu profond, si sa journée n’aurait pas eu raison d’elle. Pourtant, elle se voyait bien combattre la fatigue qui l’accablait, avant d’abandonner son fiancé par la solitude et de la nuit qui prenait peu à peu le dessus. Puis, elle s’y abandonna, corps et âme, pour trouver la paix de ce monde secondaire, où parfois la réalité semblait plus délicate, alors que d’autres fois elle avait raison d’Olga. Malgré tout, cette nuit-là, elle était bien. Son sommeil semblait calme, doux, mais pas sans rêve. Elle se rappelait d’une sirène, d’un grand lac. Certainement celui qui bordait la maison de sa meilleure amie d’autrefois. Certes dans son souvenir, cet endroit n’abritait aucune créature marine, pourtant son imagination divaguait peu à peu. Elle se rappelait que la créature l’appelait. Certainement vers les profondeurs de l’eau. Cette invitation était remplie de belles promesses, mais elle n’était pas dupe. Elle savait bien que sous cette image dites parfaite, se cachait de la noirceur. Et pourtant, cette noirceur l’appelait. À un moment, elle crut bien pouvoir fuir, pourtant, elle fit un pas vers l’eau, puis deux. Rapidement, elle se vu submerger par l’eau. Et elle coulait, lentement. Pourtant, elle n’avait pas peur, bien au contraire. Elle se sentait en paix, comme si elle n’avait pas pu faire meilleur choix. Même si elle savait bien qu’elle finirait par se noyer. Puis elle entendit son nom, prononcé si doucement. Au départ, celui-ci était si lointain. Pourtant, alors que celui-ci se répétait, il devenait plus réel. Comme s’il venait de l’extérieur. Et sa tête sortit de l’eau, alors qu’elle revenait vers la réalité. Au même moment, ses yeux ouvrirent et elle remarqua qu’elle ne s’était pas trompée, que son nom venait bien de la réalité. À son réveil, elle vu ces yeux magnifiques qu’elle avait abandonné ce qui lui semblait un court instant. Qui était rivé vers elle. Louis ne semblait pas avoir réussi à fermer l’œil de la nuit et un sentiment de culpabilité commença à la rongée. Elle n’aurait jamais dû l’abandonner ainsi. En quelque sorte pour se faire pardonner, elle lui gratifia un petit sourire, alors qu’elle retrouvait peu à peu ses esprits. « Louis. » Elle resserra alors l’emprise de leurs mains, celle l’aidant à se rappeler de ce qui était vraiment important pour elle, lui. Il semblait perdu, et elle détestait le voir ainsi. Pourtant, cela semblait si fréquent. Elle qui aurait tant aimé chasser ses maux. Elle n’avait réussi à ce jour qu’à les apaiser. « J’ai dormi longtemps ? » Elle ne put s’empêcher un petit rire, semi gêné, semi endormi. Elle détacha alors rapidement ses doigts des siens, avant d’apposer sa main sur sa joue pour ressentir toute la chaleur qu’elle lui apporterait. « Dit moi ce qui trouble ton sommeil... » Elle désirait plus que tout lui voler son mal, lui offrir le sommeil paisible qu’il méritait, pourtant cette tâche qui semblait si simple en apparence était certainement la plus complexe. Mais peut-être qu’un jour, elle trouverait enfin la solution.

Au moment même où elle ouvrit les yeux, Louis se retrouva plongé dans un océan de douceur et il savait parfaitement que c'était terminé pour lui, jamais il ne parviendrait à s'endormir ce soir là. Quatre ans, quatre ans qu'il partageait sa vie avec Olga et pourtant chaque regard provoquait en lui une éruption volcanique. A chaque fois que ses yeux sombres se posaient sur lui, une décharge électrique lui parcourait le dos. Il ne pouvait se résoudre à faire autrement et ce regard après ces quelques heures passées loin de l'autre faisait ressentir en lui l'excitation du premier jour. Il soupira de bien être, elle était avec lui. Cette fois ci, ce fut son regard qui se posa sur elle. Sur sa petite effarouchée bulgare à l'accent si particulier.  Même dans la pénombre, il percevait sa beauté, même les yeux bandés il pouvait sentir sa beauté. Ses yeux glissèrent sur ses cheveux à mesure que ses doigts les caressaient, sur son front, sur son nez jusqu'à ses joues et ses lèvres rosées. Ils restèrent silencieux quelques instants, alors qu'elle parvenait peu à peu vers lui et qu'il appréciait son éveil.  « Louis. » Il lui souri alors, timidement, toujours quelque peu honteux de la réveiller à une heure si tardive le soir. « J’ai dormi longtemps ? »  Louis se retourna vers leur horloge, les aiguilles magiques indiquaient, sans grande surprise, qu'il était bien tard pour avoir cette discussion. Il saisi leurs couvertures pour les ramener vers eux, presque pour les ensevelir. « Non. C’est juste moi qui devrait faire pareil. » Répondit-il, traçant ses formes circulaires sur la peau de son bras, l’esprit un peu ailleurs. Des nuits comme ça, Olga et Louis ne les comptaient plus. Cela n’arrivait pas tous les soirs, évidemment, le jeune Weasley ne tolérerait pas qu’elle subisse les mêmes insomnies que lui simplement pour lui tenir compagnie. Souvent, il la regardait s’en aller, puis en faisait autant, quelques heures plus tard. Parfois, il s’endormait même avant elle. Or, le sommeil était éphémère et ne lui laissait que quelques instants de répit avant de le propulser vers la froide réalité.  « Dit moi ce qui trouble ton sommeil… » Il posa sa main sur la sienne, poussant un long soupir. A l’esprit lui venait un millier de choses. Harry, Ginny, le parti pris. Le Ministère et ses responsabilités, ses risques aussi. Sa soeur Victoire et son fils qu’il n’avait pas vu depuis un moment. Le regard désapprobateur et déçu d’un père dont il n’avait jamais été proche. Les blessures très lointaines d’un amour perdu qui ne se refermaient pas vraiment. Par dessus il y avait Olga, les cheveux détachés, qui dansait sur la plage près de la Chaumière Aux Coquillages. Qui riait aux éclats, les pieds plongés dans l’eau glacée d’Angleterre. Il aimerait tant y retourner avec elle, près des coquillages. « Les gobelins. » murmura t-il, c’était en partie vrai, tout le vacarme médiatique sur l'exécution de l'un d'entre eux ne donnait pas aux employés du Ministères des journées calmes. Il n'y avait pas que les gobelins mais Louis n'avait pas la force d'expliquer et Olga n'avait pas celle de comprendre, pas si tard. Ce n'est pas le moment. « Je n’ai aucune idée de quoi ils sont capables, j’ai comme l’impression qu’on les sous estime énormément. Tout le Ministère est dépassé mais tout le monde continue à prétendre que la situation est sous contrôle. Je ne sais pas ce qui arrivera demain. » fit-il, d’une traite. Il repris son souffle et replongea son regard dans le sien. Il s’avança un peu plus, posant son front contre celui de sa fiancé, l’attirant vers elle. Il ne voulait pas de Ministère, pas d’Auror, pas de Médicomage, juste Louis et Olga, simple comme ça aurait toujours du le rester. « Parle moi de tes rêves. Est-ce que tu en as fait ? »